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Voyage à bord de Vadrouille
Voyage à bord de Vadrouille
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La traversée de l'Atlantique

La traversée de l'Atlantique

Nous devons arriver dans trois jours, il nous reste moins de 400 miles à courir. Il est 23h30 et j’ai pris le premier quart de nuit. Nous avons déjà changé trois fois de fuseaux horaires depuis notre départ. Le vent souffle entre 20 et 25 nœuds, nous marchons bien, dans les 6,5/7 nœuds de moyenne. La mer est forte, mouille parfois le cockpit, et fait ronronner le pilote automatique.

La nuit, pleine d’étoiles, est assez claire et laisse suspecter les grains à venir, trombes d’eau s’abattant sur le bateau pendant quelques minutes à une heure.

Il fait bon, je suis pied nu, gilet sur le dos, à surveiller l’AIS, l’horizon, les nuages dans la nuit, et les voiles.

C’est ce moment que je choisis pour vous faire partager mon ressenti de cette traversée. (Même si un grain risque fortement de venir perturber cette tranquille concentration nocturne)

La traversée de l'Atlantique

Nous sommes partis de Mindelo, au Cap Vert, il y a un peu moins de deux semaines. Alex nous a rejoint là-bas pour traverser, l’équipe étant déjà augmenté de Céline et juju, avec qui on a fait la traversée Canaries/Cap vert.

Concernant Mindelo, n’y prévoyez pas d’y faire votre stock de provision avant la traversée ! Très peu de choses dans les rayons, beaucoup de mauvaises, peu de fruits et légumes, qui de toute manière, pourriront très vite. Heureusement nous avions fait un bon stock aux Canaries.

La traversée de l'Atlantique

Question météo :

Nous sommes arrivés le 8 décembre au Cap Vert, et avons attendu 10 jours une bonne fenêtre météo. Et nous avons bien fait !

Nous sommes partis avec 20/25 nœuds de vent annoncé, et cela est bien suffisant. Nous avons passé plus de temps à freiner le bateau qu’à chercher comment le faire aller plus vite. Et avec ce vent là, la mer du vent levée est déjà bien assez forte à mon goût. On ne traverse pas tous les jours, alors attendons une fenêtre optimale. La nôtre (de météo), a été très correcte.

Nous nous sommes fait secoué les premiers jours dans une mer assez forte et croisée, faisant ronronner le pilote à chaque vague. Une fois la houle alignée avec le vent, à environ la moitié du chemin, c’est l’autoroute.

Je pense d’ailleurs que la prochaine fois nous ne ferons pas escale au Cap Vert, nous partirons directement des Canaries, ce qui permet de faire une route avec la houle dans le dos, beaucoup plus confortable. Nous attendrons peut-être aussi Janvier, période à laquelle les Alizés sont censés être moins fort. (On ne fait pas de la régate, on est pas pressé hein !)

Les vents soufflent bien en permanence, variant de 5 nœuds environ toute la journée. La houle fait entre deux et quatre mètres quand ça souffle, et la mer s’aplatit quand le vent se calme.

Il fait plutôt très chaud la journée, et bon la nuit, je n’ai chaussé qu’une fois mes bottes au début. Cependant, veste et salopette de quart ont été utiles quelquefois.

La traversée de l'Atlantique

Question voiles :

Les Alizés étant bien établis, nous avons fait route au grand largue ou vent arrière tout du long. Dès que l’on a pu, on a mis les voiles, grand voile sur bâbord avec un frein de bôme (qui cassera 2 fois…), et génois tangonné sur tribord. Nous n’y avons presque plus touché jusqu’à la fin.

Nous n’avons pas fait de moteur, sauf pour recharger les batteries. Nous l’avons en gros fait tourner une heure par jour la nuit. (Nous n’avons pas été économe en énergie, pilote toute la journée, frigo, ordinateur, musique, tous les équipiers ont rechargé leurs téléphones…). Nous aurions peut être pu nous passer de cette heure de moteur, le soleil nous rendant autonomes grâce aux panneaux solaires).

La traversée de l'Atlantique
La traversée de l'Atlantique

Traversée et vie à bord :

J’étais très angoissé de larguer les amarres, de décider : « ça y est, c’est le moment où j’embarque famille et amis dans une traversée de l’Atlantique, sur un bateau que j’ai moi-même préparé. Et si j’étais passé à côté de quelque chose ? De quel droit ai-je le droit de mettre en jeu la santé de ma fille ? Suis-je assez sûr de la préparation du bateau pour larguer las amarres avec joie et naïveté ? » Assurément non.

Je me suis beaucoup demandé au Cap Vert le sens de tout cela, et le pourquoi ai-je embarqué Romane la dedans.

 

La traversée de l'Atlantique

Nous voilà donc parti le 20 décembre, en milieu d’après midi, sous GV seule, et à déjà 7/8 nœuds.

Les premiers jours, il faut prendre le rythme lent du bateau, se déplacer doucement, se tenir tout le temps. Une minute d’inattention pendant la vaisselle et vous voilà éjecté en arrière par une vague vicieuse. (Nous sommes d’ailleurs sanglés lorsque nous faisons cuisine ou vaisselle).

Les premiers jours, on observe beaucoup le comportement du bateau, des voiles, du safran, les fonds de cales…tout ce qui pourrait être problématique.

Les premiers jours, c’est aussi le temps de s’amariner. Heureusement, personne n’a été malade à bord de Vadrouille. Mais au début, on passe beaucoup de temps à l’extérieur dans le cockpit, personne ne voulant aller faire vaisselle ou cuisine. Ca remue beaucoup trop. On a bien remarqué que celui qui mangeait le moins était celui qui avait préparé le déjeuner !

La traversée de l'Atlantique
La traversée de l'Atlantique

Au bout de deux/trois jours, assez vite finalement, le rythme s’est installé. Nous sommes cinq adultes, et faisons des quarts de 2/3 heures. Ce qui permet à une personne de se reposer un peu la nuit. Bien sur ce n’est pas si simple, et celui qui n’est pas de quart est parfois celui qui dort le moins bien !

L’équipe se réveille vers 8/9 heures. (Parfois même une petite grâce mat’ de juju). Tout le monde se réveille tranquillement, et le café peut durer assez tard. Assez vite se pose la question du déjeuner, et donc de ce que l’on va préparer. Céline nous a d’ailleurs régalé de pain maison toute la traversée.

Déjeuner/café/préparation du gouter vers 15h/ apéro à 17h30 et préparation du diner vers 18h. En fait on a passé notre temps à faire à manger ou à penser à ce qu’on allait manger. Et on s’en est pas mal sorti !

La traversée de l'Atlantique
La traversée de l'Atlantique

On a donc fait notre pain, délicieux, accompagné de sardines, pâté, foie gras ou autre gourmandises. Nous avons clairement manqué de légumes, ceux trouvés à Mindelo étant bien maigres et rares. On s’est rattrapé avec des confits de canard, gratins dauphinois, pizzas maisons, daurades à toutes les sauces, pâtes et tartes, gâteaux et mousse au chocolat, muffins au cœur fondant de nutella , coulis de caramel…etc…

Bref, on a pas dû perdre de poids pendant cette traversée ! Surtout qu’on a fait noël et nouvel an à bord ! (certes moins fournis qu’à la maison, on est sur un bateau hein ! mais on s’est quand même fait plaisir de champagne, foie gras, et bonnes victuailles)

La traversée de l'Atlantique
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La traversée de l'Atlantique
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L’après midi est aussi entrecoupée des siestes de Delphine et Grégoire, des lectures d’Alex et Juju. Nous avons eu trois jours de grâce au milieu où le vent et la mer ont faibli. Certes notre moyenne de rapidité a baissé, mais on a pu prendre des bains de soleil sur le pont, faire des exercices ou encore se baigner au milieu de l’océan dans une eau à 26°. (avec 5 km de fonds sous les pieds….brrrr)

La traversée de l'Atlantique
La traversée de l'Atlantique
La traversée de l'Atlantique
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On a souvent regardé un film ensemble le soir dans le cockpit, (on s’est fait tous les star wars), puis vers 21 heures on commence les quarts. Chacun a peu à peu trouver son rythme de quart préférentiel, entre ceux qui préfèrent commencer, ceux qui préfèrent terminer, ceux qui s’en foutent.

Toute l’équipe s’est très bien entendue, et mis à part quelque coups de fatigue bien

Normaux de temps en temps, notre entente a été vraiment formidable.

 

La traversée de l'Atlantique
La traversée de l'Atlantique
La traversée de l'Atlantique
La traversée de l'Atlantique

Au niveau des poissons, on a été débordé de daurades coryphène la première semaine, puis plus grand chose. Mis à part les multiples poissons volants échoués sur le pont quotidiennement. Il y en a même eu un qui est tombé directement sur la tête de Delphine à l’intérieur du bateau ! La bestiole est passé par un hublot. On a bien sur eu des dauphins, petits et gros, des baleines globicéphales. Mais surtout deux grandes baleines, qui nous ont accompagnées toute une matinée à jouer près du bateau… extraordinaire. (Regardez la vidéo montage de Céline)

 

La traversée de l'Atlantique
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Et Romane dans tout ça ?

 

Et bien, on peut dire que c’est elle qui s’est la mieux amarinée ! Qu’elle soit dans le cockpit, dans une cabine ou une autre, elle se joue complètement des mouvements du bateau ! Alors que l’on tous passé deux semaines à se tenir toute la journée (et toute la nuit), et à tenir tous les objets non rangés autour de nous ; elle, joue du matin au soir, les mouvements de son corps épousant ceux du bateau. Jamais malade, elle est tout de même parfois agacée que ses jouets se fassent renverser par le bateau . Et râle assez régulièrement.

Bon, quand tu met Romane dans le cockpit, avec 4 ou 5 adultes assis sur les bancs, évidement, elle te marche sur les pieds régulièrement, et assez impunément.

Romane semble s’être complètement habituée au bateau et à l’environnement marin. Elle veut toucher les poissons que l’on pêche, et attrape les oiseaux qui viennent se reposer sur le pont, ( ou dans le bateau !). J’en ai même retrouvé un au pied de mon lit un matin.

 

En fait, je suis admiratif de ma petite fille, courageuse, bavarde, elle a été ( pour une enfant de 3 ans enfermée dans un bateau pendant 2 semaines) très agréable à vivre, sage, dynamique, vivante. Elle a finit par se jouer des vagues, et à se plaire à les voir. Elle dort dans toutes les conditions, a mangé ce qu’on voulait (ou pouvait) lui faire, et tant pis si ce n’est pas ce dont elle a l’habitude.

Elle n’a franchement pas été un poids à gérer, elle a plutôt égaillé nos journées. Alors la première que je veux remercier, c’est toi, ma petite fille, que j’ai embarqué dans ce projet fou, toi qui m’accompagnes si facilement et avec joie, toi qui animes mes journées de ton dynamisme.

Tu es, et tu as été formidable, ma petite princesse. Je suis tellement fier de toi.

La traversée de l'Atlantique

Ensuite bien sur toi, ma femme. On a monté ce projet ensemble, on a galéré à trouver un bateau, des financements, à le préparer, à le peindre, à décider de ce que l’on fait ou pas… Toi qui est parti partout pour gagner des sous, et qui revenait pleine d’entrain sur le bateau. (comme d’habitude). Merci à toi, qui a bien voulu toujours prendre n’importe quel quart, et qui du coup s’est souvent retrouvée à prendre le second. Toi qui nous a porté dans tous les moments où j’ai douté.

La traversée de l'Atlantique

Merci Céline, qui nous accompagne depuis le début, toi qui a tellement bossé sur le bateau, mais toi aussi qui nous as aidé à tout pleins de trucs dans notre vie, à déménager, à réfléchir, à bricoler, toi qui est notre postière et notre porte-parole pour la banque, toi qui est notre attache légale en France. Merci de nous avoir si bien accompagné sur les mers, de nous avoir régalé de tes desserts et de ton pain, d’avoir appris à gérer ce gros bateau, d’avoir tenu le cap pendant cette traversée !

La traversée de l'Atlantique

Merci Juju, mon associé, qui nous accompagne dans nos vies aussi, qui gère les cabinets sans moi, qui nous a aidé à peindre et à bricoler sur ce bateau. Tu as géré tout tes quarts, presque toujours le troisième, celui en plein milieu de la nuit. Tu as été un super équipier, sur le bateau, comme dans la vie. Tu nous as fait rire de ta fraicheur, tu es soutenant, tu es tellement sympa !

La traversée de l'Atlantique

Merci Alex, toi qui nous as accompagné sur cette traversée, mon ami d’enfance, on s’est retrouvé ensemble au milieu de l’océan, et ça n’as pas de prix. Tu nous as tellement régalé de ton humour, de ton dynamisme, du matin au soir, toujours partant, toujours de bonne humeur. C’était formidable de traverser avec toi, tu as ambiancé le bateau de ta vivacité.

La traversée de l'Atlantique

Merci à vous tous, équipier d’un temps, d’un océan. Cette traversée aurait pu être un enfer, et elle a été merveilleuse grâce à vous.

 

Vivement la prochaine !

 

(Ce récit a principalement été écrit à la fin de la traversée, et terminé après. Il reste bien sur des choses à dire sur cette traversée, qui a été une épreuve de vie magnifique, magique, bouleversante.)